Jil Is Lucky – In the Tiger's bed (et autres histoires)

L’album est sorti depuis le 18 février et cela fait plus d’un mois que j’essaie de m’atteler à cette chronique : Jil Is Lucky fait partie des groupes ou artistes que j’ai suivis de tellement près qu’il m’est quelque peu difficile d’avoir un discours totalement objectif.

Certes, je l’avais fait pour le premier album sur Le-HibOO, mais c’était il y a trois ans et le public découvrait alors encore doucement.

Aujourd’hui le contexte est différent, et le deuxième album marque le début d’un vrai nouveau chapitre alors j’ai envie de mettre un peu de perso dans l’histoire, une sorte de mini-rétrospective.

(Paragraphe à sauter si seule la partie « In the tiger’s bed » vous intéresse …)

Traîner régulièrement à La Flèche d’Or fût la meilleure idée que nous (ma bande de potes & moi) ayons pu avoir en 2006 & 2007. C’est là que j’ai découvert – entre autres – Jil Is Lucky (merci The Whitest Boy Alive d’avoir joué le même soir), en assistant par hasard à leur premier concert.

Un coup de cœur immédiat. Le genre de coup de cœur qui te fait aller chercher direct en sortant les prochaines dates de concert.

A l’époque, pour écouter la musique de Jil Is Lucky, il n’y avait que MySpace et le live. Alors inutile de vous dire qu’on a littéralement écumé tous les bars et salles parisiennes où ils jouaient.

Jil on l’a vu jouer dans toutes les formules possibles : en solo, en duo avec Bensé, en groupe, en acoustique, en électrique … on a écouté toutes les maquettes de ce qui allait devenir le premier album, décortiqué les paroles à la virgule près, filmé des dizaines de concerts pour immortaliser l’évolution des arrangements et les chansons « inédites » (God bless you, Magic Mushrooms, Uptight …), et même bootlegé à l’ancienne un sacré paquet de sets qui aujourd’hui sont complètement collectors et géniaux à réécouter (le fameux concert du Chouchou Bar par exemple, avec en exclu les chansons Monica Belluci et Jil Is Lucky « que vous n’entendrez jamais ailleurs qu’ici » … #etsi #hehe).

Au tout début, c’était très très acoustique, c’était la période Ukulele in empty bars (du nom d’une chanson réelle de Jil) : un petit côté lo-fi, du folk pas prise de tête au charme vraiment cool. Cela a donné naissance au premier EP The Wanderer (2008), acoustique mais plus du tout lo-fi, plus doux & canalisé que ce qu’on pouvait voir sur scène, offrant une lecture plus posée des chansons.

En parallèle, en live, la direction changeait sensiblement, le ton se durcissait et même si le premier album, Jil is Lucky (mars 2009) comportait toujours ce charme folk, on sentait sur les interludes et avec le final psychédélique d’Hovering Machine qu’il y avait une autre facette à explorer.

Une facette que l’on pouvait entrevoir au fil des concerts avec les nouvelles chansons qui apparaissaient (Songs we loved, My friends are nice,Crazy), et d’autres dont on n’avait même pas le temps de trouver le titre ou n’étaient jouées qu’une fois, dans l’émotion d’une fin de concert (The ballad of Luchos de Las Planas, ou l’inédite en français).
C’était d’ailleurs particulièrement intéressant de découvrir parfois les chansons dans une version acoustique et de les ré-entendre peu après en version groupe. Un exemple de grand écart avec My Friends are nice : version guitare/violoncelle en mars 2009, version percussive en 2010 et la version la plus récente.

Bref, on avait beau les avoir vus 50 fois (et si vous suivez, vous comprendrez que ce n’est pas qu’une expression), il y avait toujours un truc nouveau à découvrir, du moins jusqu’à ce que la tournée prenne de l’ampleur où là forcément il a fallu millimétrer un peu.

S’il y a un concert à retenir de la période The Wanderer, ce sera clairement celui de La Cigale d’avril 2010. Un beau premier sommet où l’osmose avec le public fût particulièrement géniale.

(… on y arrive …)

En mai 2011, nous croisons Jil lors d’un petit concert de deux des membres du groupe.

L’occasion de s’enquérir des avancées du nouvel album et la conversation prend soudain un tour très sérieux lorsqu’il raconte l’histoire du tigre (que l’on trouve maintenant dans sa biographie officielle) et que c’est de là que lui est venu la ligne directrice de l’album.

Plus tard, assis sur un bord de trottoir, il m’a fait écouter deux titres. J’ai le souvenir d’un choc, au sens où ça changeait de prime abord plutôt radicalement avec tout ce qu’on avait pu entendre. Le souvenir aussi d’avoir trouvé ça génialement prometteur.

Et puis l’attente …

–> In the Tiger’s bed // CHRONIQUE

A l’occasion du Disquaire Day l’an dernier, Jil Is Lucky et ses acolytes ont fait leur retour sur scène. Nouvelle configuration scénique, nouveaux titres.
Découverte live, et premières impressions très bonnes puisque même avec un son carrément « plus fat » Jil semblait avoir gardé son style inimitable d’écritures (textes & mélodies).

Impressions confirmées par les concerts suivants, où le virage se dessinait nettement au vu des versions remixées de certains anciens titres (The Wanderer, I may be late, Uptight).

Et puis l’album. In the tiger’s bed.

Un titre qui fait référence à cette anecdote qui aurait pu mal tourner, mentionnée dans sa nouvelle biographie, et dont Jil avait d’ailleurs fait une chanson – qui ne figure pas sur l’album -, sous le pseudonyme « Kill Juicy’s » :

I was standing on a branch with couple of friends
And now I wandered if I will see them again
Coz everything turns to red in the tiger’s bed
In the tiger’s bed

» [Vidéo] Kill Juicy’s – In the tiger’s bed

La figure du tigre est le thème central de l’album, mais, s’il est bien réel dans la mésaventure qui a tout déclenché, dans les textes il apparaît plutôt en filigrane en personnifiant les démons intérieurs de l’artiste (Pills, A little gap). Jil revient sur une période sombre de sa vie et ses textes sont particulièrement noirs, même s’il y glisse toujours des métaphores et formulations légères (Sick-cretlyChai Tea, Buried in m vans shoesA little gap…) Il se livre beaucoup plus qu’auparavant et se montre sous un jour plus touchant.

I sing since a long long time
Now I’ve grown old / I let the people know
I know you heard me on the radio
But you used to turn up your nose at me before
(…) This is not the way I planned it / Not at all

Le contraste avec le rendu musical est d’autant plus saisissant qu’In the tiger’s bed est tout sauf un album déprimant, bien au contraire !

Refrains accrocheurs, mélodies imparables, savant mélanges des genres : exit les sons folks, ici tout tend vers le rock electro avec parfois des soupçons de r’n’b (la fin de refrain d’A little gap, le pont de Not at all) et des sons étonnants comme ce solo de guitare synthétique sur Backslider.

De prime abord c’est sûr que le choc est là, mais on retrouve ses marques assez vite et c’est quasiment impossible de ne pas se laisser entraîner par l’envie de chanter ou de danser (littéralement, sur des titres comme Not at all, la fin géniale de 40 times a day ou le premier single Stand all night).

Un virage musical qui en déroutera sûrement plus d’un mais qui n’est pas si radical pour ceux qui avaient vu la dernière mouture de la tournée (d’autant plus que sur les concerts actuels, c’est moins marqué que sur l’album). Et puis, Jil s’est toujours placé un peu en marge des « chanteurs folk traditionnels », arborant des casquettes de rapeur, citant des influences hip hop, collaborant avec des artistes comme Nervous Cabaret … ce qui pouvait laisser présager une autre facette à venir.

« C’est un retour à ce que je suis vraiment. Cet album est beaucoup plus honnête et me ressemble davantage que le premier. Je le porte en moi depuis bien plus longtemps, mais il m’a fallu passer par autre chose pour pouvoir exprimer autrement que dans le pathos tout ce que j’ai ressenti lors de mon bad trip. » *

Outro

Comme beaucoup, ce qui m’avait plu dans la musique de Jil Is Lucky au départ c’étaient les harmonies vocales, le violoncelle accompagnant les guitares, leur alchimie de groupe, le côté fun qu’ils insufflaient à la musique en général.

C’est un groupe dont la musique m’accompagne depuis maintenant près de six ans mais j’avoue m’être demandé si j’allais vraiment adhérer à la suite, même si sur le principe je trouvais ça bien que la direction change…

Aujourd’hui je me demande comment j’ai pu en douter, tant j’aime profondément In the tiger’s bed.

A ranger en bonne place dans le rayonnage « Albums kiffants » de vos discothèques.

Jil Is Lucky – In the Tiger’s bed
Track list
1. Insomnia
2. Stand all night
3. Chai tea
4. A little gap
5. Forty times a day
6. Dead star
7. Not at all
8. Leaving you (right now)
9. Pills
10. Backslider


* Citation extraite de la très bonne chronique du Point.fr

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